DE L'ENFANCE 5/7
Last updated: Mar 5, 2022
Des formes
L’expression calculée de la critique s’éleva d’ici. Comme s’il y avait dans l’air, au-delà de toutes mes volontés, un monde libre de mes pensées. Comme si « par l’air », UN monde ne pouvait pas suffire. Ceci me fait croître des attitudes inversant mes valeurs ; où l’aigreur envahit tout. Où la peur ne vit que dissimulée, tenant gauchement droit la face au monde me disant « qu’il faut bien lui faire face » moi qui me suis inventé que je n’en faisais pas partie. Et ça ne termine pas là, après ma face : mon allure, mon caractère, mes pensées, moi moi moi -toujours- devait se placer sur le podium d’une course sans fin. Alors j’ai grandi, j’ai compris qu’il fallait grandir, alors j’ai grandi. Mais tout ce qui grandissait n’appartenait qu’aux choses visibles : mon corps, mes pensées, les autres… Ce « moi » qui voulait tant grandir pour être « mieux que » ne put jamais fonctionner, car tout grandissait aussi. Les seules choses qui se démarquèrent furent les airs. Je m’y suis donc attelé et me couvris de tout ce qui était à ma portée, dans une frénésie d’appartenance et d’angoisse : de l’enfant sage aux crises de nerf, du grand et fort à faire du boudin, du râleur au gars qui sait tout, du pleurnicheur au clown. Mais toutes ces formes n’ont fait que venir et partir, inlassablement, comme les vagues d’un océan. Et bien que mon mental s’appropriait chaque venue comme étant ce que j’étais, chacune s’en retournant ne faisait que mettre à jour l’incertitude d’être ce que je pouvais bien être. Comme si rien ne pouvait tenir. Et pourtant, il y a cela, en moi, toujours présent, attentif au moindre mouvement de l’océan, comme conscient de l’innombrable qu’est l’instant. Car il demeure ici, toujours, les interstices d’événements comme l’éclat de rire du pet de papa, le câlin offert à la tristesse de maman, la joie folle de sortir dans la cour, la colère d’amour contre l’injustice en tant que chose juste ou le simple aveu d’être dans l’erreur… Quel est donc que cette paix, résonnant comme un souvenir ? Pourquoi c’est ici que je me reconnais ?
-jo-
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